mercredi 31 janvier 2018

Entracte !





mardi 30 janvier 2018

"Negotiation":sur la route de soi, négocier un virage sans se freiner !


S’ils ont pour sol commun l’Asie, leurs cultures et approches du mouvement ne sont pas les mêmes. Danses urbaines et recherches sur la tradition pour Olé Khamchanla, un délicat déplacement vers la création contemporaine pour Pichet Klunchun danseur traditionnel. 
« Les envies de créer émergent souvent au cours de rencontres, de manques, de frustrations, ou de bonheur » déclarait déjà Olé Khamchanla lors de son premier solo Kham devenu le nom de sa compagnie. Depuis, toujours au croisement des routes de soi, l’artiste laotien arrivé en France dès la petite enfance, poursuit sa quête des origines. Creusant dans la mémoire des gestes, il dialogue avec d’autres danses et cultures. Dans Negotiation, avec Pichet Klunchun, maître de Khon, danse traditionnelle de masque en Thaïlande, chacun déploie son propre espace, vaste, dense et intériorisé. Le corps ancré au sol, à pas glissants parfois, torses et bras esquissant vrilles et autres arborescences légères ou puissantes, leurs présences se fait rencontre."



Ils sont  siamois, mêlés, reliés par des pulsations sonores, comme un tronc commun, un édifice humain qui pulse à l'unisson. Même tenue, nus pieds, de gris et de noir. L'un a une longue chevelure , l'autre un crâne de moine  Les allures, postures et attitudes vont lentement diverger, ils se séparent, jumeaux en miroir. Les douches de lumières, après les fondus au noir les révèlent peu à peu dans un duo de solitaire.
De même gabarit, ils vont se différencier, l'un tendu et ramassé avec force sur lui-même, l'autre fluide, gracieux, parcouru de gestes lumineux, comme une danse "serpentine", libre, évanescente au bout des doigts.
Reptations, secousses les animent tour à tour, sautillés, soubresauts puis mécanisme régulier: les rôles s'inversent, les singularités se gomment, s'effacent au profit d'une gestuelle commune. Chacun regagne son altérité, sa singularité, reprend ses droits, ses marques et trace dans l'espace volutes, spirales enroulées...
Entrelacs, mets tissés de trame et de chaines, à déguster comme une cuisine exotique aux fragrances inconnues...
La force de l'un, Pichet Klunchun, se dégage de son corps guerrier en un combat singulier avec lui-même.Moine concentré à la gestuelle dosée et précise. Ses doigts comme des papillons versatiles, pulsatiles, vibrent dans la lumière, sans périr, animés de tremblements singuliers. La fluidité de Olé Khamchanla est subtile et sourd de ses bras longilignes, vaporeux, graciles.La musique de Léo Jourdain galvanise et porte les corps dans des transports radieux.
La confrontation se fait grâce et rencontre, échange, mimétisme et la passation de l'un à l'autre fonctionne comme un va et vient étrange et naturel.La fusion des gestes, comme une passation naturelle opère et sème le trouble: qui de l'un est l'héritier du hip-hop, qui de l'autre est le détenteur des codes savants d'une danse très structurée? Au delà de la virtuosité inhérente à chacune de ses danses, c'est sur la trace dansée de leurs écritures que se penchent nos deux interprètes, poreux, perméables au langage de l'autre. Vase communicants, réceptacles de phrasés et enluminures savants, passeurs de beauté, de souplesse, de gravité. 
Dans les entrelacs de la danse se glisse une familiarité, une complicité étroite, respectueuse, considérant l'autre comme son semblable avec toutes ses différences. Pour ne jamais gommer l'essentiel, l'essence de l'être, sans oublier l'être ensemble pour autant.

A Pole Sud les 30 et 31 Janvier 

"Soirée pyjama chez Vampirine la Ballerine"


Vampirine la ballerine décide d’organiser une soirée pyjama au manoir hanté familial. Les préparatifs s’annoncent pleins de rebondissements pour transformer le lieu en un endroit accueillant… et surtout pas trop effrayant. Il va falloir décorer, cuisiner, balayer, organiser un défilé, mais aussi enfermer les monstres et les araignées, pour que la soirée entre copines soit une réussite !
De Anne Marie Pace et LeUyen Pham

lundi 29 janvier 2018

Pointes !



Danses palmées !



dimanche 28 janvier 2018

Mario Cucchi: formes dansantes








La danse de Philippe Maliavine




vendredi 26 janvier 2018

"Hijikata Tatsumi: penser un corps épuisé" de Uno Kuniichi


Une analyse philosophique et textuelle de l'œuvre du créateur du butō, Hijikata Tatsumi : l'auteur propose une lecture déterritorialisante du danseur et chorégraphe japonais, le reliant à des figures comme Genet ou Artaud, tout en lui restituant sa spécificité propre.



"Grrrrrr" de Sylvie Balestra: pieds de poule et pas de loup !


Les animaux sont des êtres familiers de l’univers de l’enfant. Les reconnaître et les imiter devient pour lui un jeu. Dans un solo emprunté à des rituels dansés traditionnels et imaginaires, Sylvie Balestra interpèle et accroche le jeune spectateur. 
Du tigre à l’oiseau, la danseuse bouge et transforme son corps à l’aide d’un costume fait de laine, de fourrures et de paillettes, dévoilant un bestiaire aux figures hybrides. Expérience joyeuse et sauvage, Grrrrr invite le public à se mettre en mouvement et à entrer dans le cercle du rituel, dans un bal final. La compagnie de danse SYLEX développe un art de la relation et de l’attention au corps physique et au corps social. Pour ses créations, SYLEX met en place des protocoles de recherche associant habitants, chercheurs, membres de communautés diverses. L’écriture de la chorégraphe et anthropologue Sylvie Balestra se nourrit de l’observation et de l’écoute des savoirs intimes et singuliers des individus.




Les enfants sont autour d'elle dans une configuration circulaire et entourent son corps, à terre, au sol, couché. Elle est immobile puis respire intensément, son thorax se soulève: elle va ramper, comme un reptile, se mouvoir , glisser et peu à peu dévoiler son identité de créature hybride, de création de matières végétales: costume de rituel fait de paille, de bijoux, parure de parade, rayonnante, légère, colorée, chatoyante à la manière des "Wilderman" de Charles Fréger où des monstres de carnaval de Silvesterchlausen de l'Appenzell suisse.



 Tantôt volatile, poule, paon sur ses ergots, fière et paradant sans jamais y laisser de plumes! Un voile ajouré pour mieux dissimuler ses bonnes intentions, comme un moucharabieh dont les pendeloques attirent le mystère qui va se dévoiler!
A pattes de velours, pas d'ours ou de loup, elle se redresse, sautille animée de soubresauts réguliers, frappe du pied comme dans les danses "trad" ou folkloriques, renouant avec les gestes simples d'une danse "virtuose" retrouvée et réhabilitée. Habitée comme une transe rituelle dans son costume, d'homme de paille, elle bâtit peu à peu son nid de cygne avec plumes et accessoires du costume qu'elle quitte, comme une seconde peau qu'on ôte.Un habitacle à sa mesure, rond, douillet, cosy, cocooning chaleureux: se faire sa place et s'y lover!
Après ce dévoilement d'identité, on retrouve la femme danseuse qui partage sa joie de faire la ronde avec les enfants, à l'aise dans cet univers de proximité . Même pas peur! Alors on se prend la main, imite la démarche de l'animal pour mieux terminer au sol, à l'abri, bien au chaud, ensemble pour ce "vivre, être ensemble" si cher à la Danse!
Beau spectacle, fédérant petits et grands dans une belle attention à l'autre: la danse comme art de la convivialité en bonne compagnie.
Au TJP jusqu'au 27 Janvier

Mary Wigman !

" A la trace": en quête de vérité et d'amour.


CRÉATION AU TNS - Texte de Alexandra Badea - Mise en scène de Anne Théron - Avec Liza Blanchard, Judith Henry, Nathalie Richard, Maryvonne Schiltz. Et la participation filmée de Yannick Choirat, Alex Descas, Wajdi Mouawad, Laurent Poitrenaux. À la mort de son père, Clara, 25 ans, retrouve dans la cave le sac à main d’une femme contenant une carte d’électeur au nom d’Anna Girardin. Qui est-elle ? Pourquoi Clara se met-elle en tête de la retrouver ? Elle part à la recherche des femmes portant ce nom. Bâtie comme une enquête, la pièce - issue d’une collaboration étroite entre la metteure en scène Anne Théron et l’auteure Alexandra Badea - convoque trois générations de femmes, interroge leur rapport intime à la filiation et à la société : que signifie être mère ? Une femme peut-elle rompre ce lien ? Qu’est-ce que la transmission ?

On l'avait rencontrée avec "Celles qui me traversent", chorégraphie singulière et rebelle, voici Anne Théron, génitrice d'un texte et metteur en scène d'une histoire: celle de la quête d'une jeune femme sur un passé qui ne la "concerne" pas, celui de son père. Mais qui résisterait à savoir la vérité, à se libérer de la torture psychique d'un "mensonge" familial, héritage et passation d'un malaise, physique aussi, qui ronge et détruit peu à peu l'âme de celle qui est visée.
Dispositif architecturé grandeur nature d'un immeuble, tranché pour y voir sur trois niveaux, les va et vient des personnages qui vont habiter ces espaces réels, face aux espaces virtuels d'images vidéo enregistrées, surdimensionnées. Espace de plain pied avec la réalité, à terre, au sol avec deux rangées de sièges: salle d'attente, de repos d'aéroport ou de médecin: va savoir...Et cela détermine le jeu de cette femme, en quête du passé de son père, à la recherche de Anna Girardin, fantôme très présent dans sa chair perturbée par "l'ignorance" d'un épisode amoureux de la vie de son père.
Ici, c'est la technologie nouvelle qui engendre des comportements sociaux nouveaux encore peu explorés pour la scène et le spectacle vivant, qui tient en haleine et orchestre le jeu des comédiennes Trois femmes, toutes différentes vont croiser le destin de Clara, fougueuse et inquiète, en quête de résolution d'une énigme qui la tarabuste et taraude du coup le spectateur, pris dans cette filature singulière: une détective qui arpente dans le doute des territoires dangereux qui ne la concernent pas. Face à elle et tour à tour, défilent de singulières icônes féminines avec lesquelles elle dialogue: une chanteuse de cabaret qu'elle piste amoureusement, une avocate insensible aux fautes du monde mais qui sauve ses clients coupables du "péché" mortel, une chercheuse en orthophonie de pointe...Autant de partenaires qui vont la mener à repenser l'Amour et la dépendance. Alors qu'une femme, blonde et belle créature parcourt le monde et rencontre sur les réseaux sociaux, des hommes en quête eux aussi, en demande de reconnaissance. Ces derniers seront filmés et apparaissent sur un écran, virtuels créatures qui causent, écoutent et questionnent Anna, celle que cherche Clara, à son insu. Pas dupe, le spectateur scrute ces mondes de communication, rendus sur la scène de façon troublante et pertinente. En dialogue avec les images animées, sans âme, Anna se torture, s'imagine dans une réalité qu'elle ne côtoie pas, où elle ne se frotte pas. Vivant par procuration, par séquences d'images projetées. Il est question des femmes, de procréation, d'amour filial, de "mensonges" , ceux que l'on s'accorde pour préserver notre "intimité".
Les partenaires d'Anna, tous des hommes singuliers se heurtent à son indifférence, à son égocentrisme exacerbé: joué par Nathalie Richard, froide et attirante femme fatale, inaccessible proie des hommes attirés par sa présence fantomatique désincarnée par la technologie réductrice d'icônes, le personnage séduit, intrigue et aspire nos désirs vers l'appropriation. Désinvolte et perturbatrice, face aux questionnements sempiternels de Clara -une Liza Blanchard émouvante et perspicace détective - jeune et frêle proie de son destin qu'elle croit maîtriser.
Judith Henry, personnages multiples, incarne de façon percussive, des attitudes, postures sensibles pour dialoguer avec cette frêle jeune femme opiniâtre et déterminée. "Sur la trace", sur la piste de la vérité, Clara rencontrera in fine, la mère d'Anna, recluse, tentant de panser les plaies du désamour .
Une épopée contemporaine très touchante, une course poursuite lente et contre la montre pour démasquer le temps qui passe et renforce nos erreurs au lieu de les libérer. "Ne me touchez pas" sur ce terrain des liaisons dangereuses.... Et pourtant l'enquête mène à l’obtention de la vérité: la rencontre enfin avec la personne tant désirée!
Anne Théron porte et appuie les textes avec pertinence et se joue des niveaux, dimensions d'espaces avec l'agilité d'une chef d'orchestre, entre plaint pied et tranches de vie aux étages, multipliant les pistes, les traces pour mieux défier la distanciation, l'incompréhension ou tout simplement la pudeur de nos vies, mise à mal par la curiosité déplacée. Une métaphore de l’indécence, de la lisibilité, une version obscène -derrière le rideau- de nos existences qui masquent la vie, la véritable incarnation du vrai.Celle qui nous traverse irréversiblement!

AU TNS jusqu'au 10 Février

pour mémoire:


http://genevieve-charras.blogspot.fr/2017/04/anne-theron-celles-qui-me-traversent.html

jeudi 25 janvier 2018

"Actrice": La conférence des fleurs : danse de vie et de mort.



Texte et mise en scène Pascal Rambert - Avec Anas Abidar/Nathan Aznar (en alternance), Elmer Bäck, Luc Bataïni, Audrey Bonnet, Emmanuel Cuchet, Jean Guizerix/Pascal Rambert (en alternance), Hayat Amiri, Marina Hands, Yuming Hey, Lyna Khoudri, Ruth Nüesch, Jakob Öhrman, Sifan Shao, Rasmus Slätis... 

Grande actrice du théâtre russe, Eugenia va mourir. À son chevet, sa sœur et son beau-frère qu’elle n’a pas vus depuis des années, son mari, ses parents, ses enfants, des acteurs, des metteurs en scène... Il est temps de tout se dire, mais quoi ? Pascal Rambert réunit une distribution cosmopolite autour des actrices Marina Hands et Audrey Bonnet, dans cette pièce où il questionne tout ce qui compose une vie : les souvenirs, la beauté, les déceptions, le rapport au monde, à l’argent, à la foi, à l'art, la passion amoureuse. Que reste-il ? Quelles forces vitales, quel esprit de fantaisie remettre en jeu ? 

Et fleurs et couronnes
Sur la scène jonchée de bouquets de fleurs coupées dans de grands vases, un couple de vieux sur un banc, une jeune femme dans un lit: hopital, maison de retraite? Elle parle, s'exclame dans la pénombre, raconte des hallucinations, l'histoire de Zeus, dieu de la foudre, de ses enfants et la mythologie prend le pas sur la réalité.
Rêve éveillé où éclats de la douleur sous l'effet de la morphine?
Le propos s'éclaire quand se fait la lumière sur le plateau: on est bien dans une chambre d’hôpital où se meurt une femme, une enfant, celle de ses vieux parents qui la veillent et s'insurgent contre l'injustice: ce n'est pas elle qui devrait mourir...Femme et actrice de métier, apprendra-t-on au fur et à mesure des paroles qu'elle déploie, de ce que ses proches vont lui reprocher, lui avouer: sa sœur, Ksénia, jouée par Audrey Bonnet, longue silhouette longiligne, féroce femme d'affaires qui a souffert de vivre la réalité et non la fiction d'une vie sur la scène! 
Son mari, ivre, alcoolique, fou amoureux, son beau-frère si tolérant ...Famille étrange et tourmentée, réunie à l'occasion de la mort proche de leur Eugénia, tous à se reprocher leurs attitudes sociales ou familiales. Un univers sans pitié, cimetière "joyeux" où les fleurs coupées sont autant de reliques sur des tombeaux fictifs. Tombeaux "littéraires" qui racontent leurs vies gâchées par l’égoïsme, l'amour ou la mort omniprésente qui les guettent, les arrêtent, les "loupent" dans leur course contre la montre. L'alcoolisme fait des ravages sur Pavel-excellent jeux furieux, acharné de Jacob Hurman- la mort, incarnée par l'infirmière sans intention de guérir, sans sentiment de compassion, rode et tranche verbalement: sans pitié dans une étrange attitude et un aspect androgyne saisissant: c'est Yuming Hey qui incarne la camarde sans autre forme d'émotion que la blancheur virginale et clinique de ses vêtements immaculés.
Et chacun d'entourer à sa façon la mourante, l'Actrice qui s'est dévouée à son art, mais aurait selon sa soeur, manqué à tous les vrais devoirs humains: vivre et aimer et pas par perfusion de rôles, ni par procuration d'artifices de la scène et du théâtre.
Seule une touche, un brin d'humanité se glisse dans le personnage du professeur d'art dramatique, joué par Jean Guizerix, fameux danseur-comédien, tendre confident attentionné dans cette jungle familiale sans pitié.L'imaginaire qui parcourt le corps et le mental de l'Actrice, la sauve et fait couler les larmes au public: un lac de larmes qui la regarde: car l'écoute, le regard sont aux abois dans ce métier d'incarnation des autres, mais aussi de différenciation.C'est aussi tous ceux qui l'entourent qui jouent au "coq de bruyère", ce volatile que l'on chasse dans le Montenégro, qui fait sa parade mais finalement bat de l'aile, chute et s'écroule; que de miasme psychique et de névrose dans cette famille réunie pour le pire: régler ses comptes avec la mourante. 
"Montrer le moins" pour être efficace, voici le secret de fabrication de ses comédiens dirigés par Pascal Rambert, auteur du texte. Couper les liens, les racines, la chaleur des aveux, composer un bouquet de fleurs pour cet homme amoureux de la fleuriste du kiosque à fleurs de l’hôpital-merveilleux et pudique jeu de Luc Bataini, émouvant et naïf amoureux qui se confie à Eugénia....
Ici, tout "remue", émeut et déstabilise comme dans une danse de vie et de mort, menée tambour battant par Jean Guizerix, le seul être humain de cette bande de fous allumés. Etre acteur au risque de sa vie dans le silence aussi, territoire cher et possible à l’héroïne. Et puis "disparaître" dans le personnage, louer son corps au personnage, aux fantômes de ce théâtre No, si vrai et noble, évoqué par le maître du jeu: le professeur de rhétorique, d'éloquence et de théâtre qui a formé notre Actrice principale
Et si Marina Hans, hante le personnage d'Eugénia avec tant de justesse, de rage ou de pudeur, ce sont tous des comédiens qui jouent ce soir et jouent leur vie "artificielle" le temps du spectacle."Ecouter, regarder" pour combler ce "trou noir" qui oculte les sentiments, être blanchi par la franchise, comme celle de la mort dans cette magnifique apparition de fleurs blanches rayonnantes de la mort. Incarnée, sans faille, exécutant son devoir, son travail clinique: faucher la vie et ses remords. La rédemption de l'Actrice viendra de la reconnaissance éternelle de son public avec qui elle échange au delà de l'obscurité de la salle, ce "trou" noir, béant sur le vertige du vide. C'est à genoux qu'elle questionne la foi en compagnie d'un ecclésiastique peu convaincant sur le sujet: il ment, détourne et invente ce qu'il ignore: douleur et empathie. 
Au final, c'est une conférence des fleurs" qui sera donnée en hommage à Eugénia, sur sa couche mortuaire: un spectacle burlesque, grandguignolesque, fête de la vie et de la couleur, fête des fleurs coupées: c'est "le bouquet" final où l'on chante et prend une dernière fois le pouvoir.
Fleurs, cou-coupées, comme sur des tombeaux littéraires où le verbe se fait chair et renaît des cendres de la mort, consumée comme une chaleur qui quitte un corps et voyage aux pays des fantômes
Et si les acteurs et les actrices n'étaient que fruit de notre imagination?

Et les fleurs, ce "meilleur de quelque chose" éclosent et leurs floraisons à fleur de peau, sans état d'âme ravissent: et fleurs et couronnes pour cette cérémonie funèbre, ode à la vie, à la mort.
Et si le Théâtre avait vocation de "tuer" la mort, d'éterniser les gestes et les mots...D'en faire des bouquets, des jardins, des parterres de beauté colorée... 
La valse des fleurs nous entraîne.

Au TNS jusqu'au 4 Février


 Apollinaire, Poulenc

"Avant le cinéma"


Et puis ce soir on s'en ira
Au cinéma
Les Artistes que sont-ce donc
Ce ne sont plus ceux qui cultivent les Beaux-arts
Ce ne sont pas ceux qui s'occupent de l'Art
Les Artistes ce sont les acteurs et les ACTRICES
Art poétique ou bien musique Si nous étions des Artistes
Mais si nous étions de vieux professeurs de province
Nous ne dirions pas le cinéma Nous dirions le ciné Nous ne dirions ni ciné ni cinéma
Aussi mon Dieu faut-il avoir du goût.
Mais cinématographe


mardi 23 janvier 2018

"Intérieur nuit": déni de pesanteur ! Jean Baptiste André en suspension de peine!


Au plateau, face à deux murs perpendiculaires, un homme découvre son environnement. Avec son corps désarticulé, il dessine un tourbillon de gestes, défie la gravité, se reflète et se dédouble devant l’objectif d’une caméra. 
Mêlant l’art de la contorsion, de la chorégraphie et de l’image vidéo, Intérieur Nuit explore les limites physiques et questionne l’équilibre propre à chacun. Le spectacle évoque aussi la solitude d’un être face à lui-même. Les vidéoprojections bousculent les repères et interrogent la réalité dans un jeu de corps et d’esprit. La musique électronique,ou naturelle, environnement réaliste, tantôt envoûtante, tantôt oppressante, propose au public une immersion dans des matières sonores. Le circassien fait de cette pièce chorégraphique une expérience intérieure, un moment d’intimité et de proximité partagé avec le spectateur. Dans sa première création, Jean-Baptiste André bâtit ce qui est devenu sa marque de fabrique : des passerelles entre les arts du cirque, les arts électroniques et les arts plastiques.

Il est sur le plateau, range et plie consciencieusement, méticuleusement chemises et pantalons, seul, enfermé entre deux grands murs...Trois petits tas sur le bord de scène, et voilà, son capital, sa fortune, son lot d'enveloppes, de tissus qu'il ne va pas tarder à investir. de son imaginaire.Prison, cage ou geôle d'oiseau sans aile qui va se heurter aux parois pour trouver sa liberté...Il se croise les pieds, joue de leurs doigts, orteils hyper mobiles, puis s'attaque à la verticalité: celle des parois qui l'enferment et le cernent:il s'attrape lui-même, se heurte, tente de passer à travers de petites fentes de liberté, interstices possibles où se loger pour fuir...Piège de lumière et d'espoirs vains. A la Erwin Wurm ou Robert Gober, son corps devient parcelle, fragment et flotte dans l'éther. Apparaît, disparaît à l'envie et provoque effet de surprise et perte de repères dans l'espace.Comme Philippe Ramette, Trisha Brown, il escalade à l'horizontale, brouillant les pistes de la perception, provocant un effet burlesque et comique. On chavire avec lui, en empathie avec les risques encourus de chute: le danger plane et rebondit, esquive et rattrape les espaces improbables qu'il se crée.


Erwin Wurm

Robert Gober

Trisha Brown

Daniel Firman

Philippe Ramette

Et de se vêtir de tous ces oripeaux, seconde peau, à fleur de perception, de peau, qu'il enfile pour se protéger, surdimensionner ses membres: il s'y empêtre, épouvantail empaqueté et les suspend au mur, séchant ses habits aux cintres: survivant d'un naufrage, esseulé, il combat, résiste, se soulève et prouve que l'on peut tenir debout, se relever de la chute sempiternelle. Ombres portées pour complice, partenaire ou ennemi.En multicouches protectrices, en mutation pour créer une créature hybride, monstrueuse, fantasmée.Des images vidéo le traquent, il se joue de leur présence, dialogue à tous les niveaux, se filme en proximité et au final nous confie solo, pas de deux ou de quatre, en gros plans cinématographiques. C'est juste et beau, ludique et réjouissant A toutes ces pistes cependant, il ne répond que par fragments, abandonnant le fil conducteur; on s'y perd au demeurant avec plaisir mais avec la frustration de l'inachevé. Jean Baptiste André, souple et acrobate, danseur fait son déni de pesanteur et séduit par sa démarche fidèle, face au vide, à remplir et combler de son propre corps. Délivré de toute contingence, il parvient à trouver une place "libre" dans le quota d'interdits et d'impossibles gestes à créer. La musique de Christophe Séchet évoque des univers maritimes, éthérés, vagues et lointains qui accompagnent les pérégrinations et divagations de notre anti-héros en prise avec une réalité à transcender.Catalogue quasi exhaustif des manipulations faites au corps dansant, il revisite trop rapidement les possibilités offertes à ces investigations. Chaplin trop timide, Charlot encore esquissé, son personnage à de l'étoffe, de la matière à explorer encore plus loin. Panorama ludique, paysage exquis du corps, son travail, sculpture et capture de lumière est bien le contraste entre "intérieur" et "nuit", obscur absurde et clarté apolinienne.

Au TJP  jusqu'au éè jANVIER

"Expressions japonaises" : l'Accroche Note estampillé nippon!


Made in Japan
L’ensemble Accroche Note propose un programme de musique japonaise mêlant œuvres contemporaines (Takemitsu, Ishida, Fujikura, Hosokawa…) et musique traditionnelle, avec la participation des étudiants du Conservatoire et de l’Académie supérieure de musique de Strasbourg-Hear.

Auditorium de la Cité de la Musique, Strasbourg (67)




Toru Takemitsu Quatrain II pour clarinette, violon, violoncelle et piano (1977) 14’
Dans une atmosphère très apaisée, sereine se déploie le temps, les cordes en écho des autres instruments, clarinette en réponses éloquentes.Infime filet de musique qui plane et se fraie un chemin dans l'espace, cette oeuvre singulière magnifie le piano, suspendu dans l'espace sonore, discret, ténu, retenu.

Traditionnel Jongara-bushi pour shamisen seul
Une touche d'exotisme et de tradition ponctue le concert: c'est une musique pour shamisen, seul qui fait voyager et décoller!

Sanae Ishida  Poèmes enchaînés pour soprano, clarinette, violoncelle, percussion, piano 13′ (2016)
Oeuvre singulière, hommage au papier, aux bruissements multiples des sons générés par les matières premières: papier de verre, papier froissé...Sous la direction d'Emmanuel Séjourné, voix et instruments se répondent, clochette, timbale, par interruption, éruptions de sonorités déroutantes et belles.Clarinette, violoncelle,percussions et piano s'ingénient à créer une atmosphère domestique, accessible, renvoyant au quotidien, à la simplicité contre la complexité ambiante dans la composition contemporaine! Dans un joli chaos organisé, vibrant,quelques halètements s'offrent à l'écoute. Ça bruisse, ça murmure, ça se froisse à l'oreille,, ça dérape et râpe à l’ouie. Des pincements de cordes, des percussions sur le corps de l'instrument, en sons hachés, brefs, enlevés en petites coupures resserrées.Un paysage sonore, avec battements d'ailes, très animal, très vivant.

Compositeur inconnu Ya-Hun pour 5 timbales 10′
Une pièce trouvée dans un sac, une partition d'un auteur inconnu: voici le mystère de cette oeuvre pour cinq percussionnistes virtuoses du geste, de la voix guerrière, du combat qui évoque rigueur, discipline et autorité japonaise. Tension persistante des sons, du volume, flambée de sons secs et rythmés:une joute guerrière nippone très convaincante et visuellement impressionnante par la gestuelle cadencée des interprètes galvanisés par tant de ferveur.Dans un ordre drastique, énoncé comme à l'armée, s'établit une tempête de sons, en résonance, en cascade: marche lente, rituel noble et pesé, comme l'ascension d'une montagne. Les mains en l'air, mailloches au poing, l'autorité tranche et juge, volontaire dans un train d'enfer: belle gestuelle médusée au final, suspendue dans l'espace et le silence après la bataille !

Chiharu Wakabayashi Ten Kei pour soprano et piano 9′ (2000)
Une belle et touchante intervention de Françoise Kubler et Wilhem Latchoumia pour apaiser la tourmente: piano égrené, voix subtile et fragile, atmosphère rêveuse et apaisante.

Encore une touche de traditionnel Sakura-Sakura pour shamisen seul et l'on enchaine avec :

 Ivan Fedele Haru Haiku pour soprano, clarinette, violoncelle, percussions (2016) 19′
Un poème , une suite de Haikus sur le printemps japonais, ses fleurs, ses cerisiers et un bestiaire fabuleux, grenouilles et oiseaux: un paysage musical onirique, simple et joyeux où Françoise Kubler joue à merveille, l'étonnement, la malice et la complicité avec ses acolytes.Dans une atmosphère joviale, comique on croise un oiseau qui corrige son vol,un poisson dans la brume, on hume des parfums de fleurs, respire le Japon à petites gorgées, en formes courtes comme des jeux d'enfants: et Françoise Kubler de murmurer ou franchement parler japonais; décidément, elle aura fait le tour du monde des langues de Babel !

Un concert, plein de charme, d'exotisme et de rigueur toute nippone.



mardi 16 janvier 2018

L'heure de la danse !




dimanche 14 janvier 2018

samedi 13 janvier 2018

"Au miroir du lac des cygnes"


Le thème d'Odette du Lac des cygnes est connu de tous, sans que l'on sache toujours d'où il vient. Pourtant, les débuts du ballet de Tchaikovski ont été difficiles, avec en 1877 un premier chorégraphe, Reisinger, réfractaire aux nouveautés musicales, trop difficiles à "mettre en pas". Il faut attendre 1895 et le travail de Petipa et lvanov avec l'aide du compositeur Drigo pour que l'oiseau prenne enfin son envol. Un Petipa pour Tchaikovski et un grand pas pour le ballet : version de référence, cette oeuvre se transforme au fil du temps, en fonction des regards et des interprétations qu'elle suscite... A partir d'un corpus pluridisciplinaire (littérature, biographies, musique, chorégraphies, cinéma fantastique...) et à l'aide de démarches méthodologiques issues des gender studies ainsi que de l'histoire culturelle, cet essai propose une analyse de l'oeuvre et de sa réception.

Béjart ! Mudra !





Ken, danseur !